Dans l’atelier…

De mains de maître, elle a choisi sa voie. A trente ans seulement. A trente ans évidemment. L'âge où l'horizon s'approche. Tous ses sens se sont éveillés le jour où elle a mis les pieds dans l'atelier des beaux-arts où enseignait le sculpteur Armand Debève. 

Les effluves de terre et de plâtre mélangées lui ont fait le même effet qu'une madeleine de Proust. Et cette glaise qui a glissé sous ses doigts ce jour-là ne la quittera plus. Une glaise du nord qu'elle reprend d'une sculpture à l'autre, parce que, dit-elle, aucune autre ne la remplacera et qu'elle garde dans sa mémoire de terre toutes les oeuvres dont elle a été la matière.

Elle vous ouvre, ici, le creux de ses mains, plein de cet argile sombre qu'illuminent la grâce, la force et l'amour de ses modèles


 

Elle est la femme et l’enfant Elle a l’âme du grimpeur fou

Quand elle transforme le rocher, frappant du couteau ce qui doit s’écrouler

L’argile partout en elle, partout où bat son sang.

De son rêve à elle même, ses mains composent et défont.

Lorsqu’elles se vident, jaillissent comme de la nuit puissance et grâce…

La terre est la nuit des couleurs, ses doigts obstinés aux caresses de l‘argile

Les ouvrir comme pour libérer une aile, comme pour déplier le vent.

Voyage jusqu’à la brûlure.

Alors elle donne la lumière comme une œuvre un jour d’été.

ANGELICA FERRANT